Vision du mythe de l’ange déchu, par Perséphone et Angélo
La métamorphose de l’ange
Lorsqu’à l’aube blanche il défroissa d’un geste lent quelques plumages froissés, l’Ange versificateur voulut écrire une ode à celle qui avait dévoilé innocemment la courbe creuse de ses hanches.
Traces grattées sur vélin surfin, la plume courrait et les mots s’envolaient, recherchant les images, transperçant les nuages, pour mieux lui rendre hommage. L’immaculé messager porteur d’heureux présages plana un temps au dessus d’elle, hésitait à lui tendre le poème accompli, redoutant les effets que provoqueraient en elles ses rimes choisies.
Des jours entiers il l’observa au dessus de sa couche lorsqu’alanguie la belle rêvait de soleils et d’aéroplanes et d’escapades délicieuses tout au bord de l’écume ou dans des champs de brumes.
Mais l’imprudent perdit de vue les origines de sa venue. Il s’approcha un peu trop près de l’épiderme endormi de celle qui le charmait par des gestes légers et les ombres dans ses yeux. Son poème glissa silencieusement de ses doigts distraits et virevolta en arabesques. Feuille morte griffonnée tombée du ciel aux pieds de la belle.
Elle n’avait jamais cru aux anges du paradis. L’oreille tendue dans le néant le souffle court un bref instant les chuchotements du fou galant entraient en elle en la charmant.
Etait-ce donc lui cette lumière dans la nuit ? A ses mines amusées, à ses sourires flattés, l’audace l’emporta et il osa cette fois parcourir de ses doigts le dessin de sa bouche, la tiédeur de ses seins et goûter au parfum enivrant de sa peau.
La passion consuma tous leurs jours et leurs nuits. L’Ange déchu découvrait les extases terrestres dans les bras d’une muse aux ongles longs, à la langue chaude et aux cuisses graciles.
Elle l’aima tant qu’elle désira goûter la chair rare de son amant. Le corps léger de l’être céleste céda bien vite sous l’incisive de sa bien aimée. Son sang coula entre ses dents, liqueur divine au goût brûlant. Son forfait accompli elle pleura doucement l’être blanc qui lui avait écrit des chants vibrants, des mots troublants. Sa peau réclamait encore la douceur de ses plumes.
Dans son dos, un matin elle sentit que deux ailes étaient venues, deux ailes d’anges, deux ailes couleur de sang.
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